Un peu d'histoire: Le KV

KV1 : Une mauvaise surprise pour les Allemands !



















En 1933 les Soviétiques lancent la production du T35, un monstre de 45 tonnes et composé de 5 tourelles (3 canons et 2 mitrailleuses).
C’est très vite un échec, tant du point de vue de sa fiabilité ou de son agilité mais surtout de la quasi-impossibilité pour le chef de char de coordonner les actions des… 10 hommes qui embarquent avec lui !

Un appel d’offre est lancé à la fin des années 30 pour fournir à l’armée Rouge un successeur à cet engin.
C’est le prototype KV (pour Klimenti Vorochilov, alors ministre de la guerre) qui emporte la décision : Contrairement à ses 2 challengers, celui-ci laisse tomber radicalement le concept multitourelles.


Il reste quand même surarmé par rapport à ses homologues occidentaux puisque emportant dans son unique tourelle un canon de 76,2mm et un autre de 45mm en monte coaxiale !
Le seul soucis, même si l’intention est louable, c'est qu’il est impossible de servir les 2 armes en même temps faute de place (et que celle dévolue à chacune est de toute façon trop parcimonieuse).  

C’est donc en 1939 que le KV1 "première série" est présenté.
Le 76,2mm est seul en tourelle avec cette fois-ci une mitrailleuse de 7.62mm en coaxiale.
On note aussi la présence d’une autre mitrailleuse identique dans la nuque de tourelle, tirant donc à l’arrière !

Ce char peut résolument être considéré comme moderne :

-Suspension par barres de torsion
-Moteur V2-K Diesel V12 de 600cv à 2000Trs
-Canon moderne de 76.2mm approvisionné à 116 coups !
-Mitrailleuses approvisionnées à 3024 projectiles
-Tous les chars ont la radio !
-Le blindage le rend invulnérable à toutes les armes antichars de l’époque : 75mm en frontal ET en latéral tant pour le chassis que la tourelle, et il est en acier laminé-soudé !
Le masque du canon est quand à lui blindé à 90mm...


Son poids est de 43,5 tonnes, sa vitesse de 35km/h sur route et 15km/h en tout-terrain.
L’équipage est composé de 5 hommes : Chef de char, pilote, tireur, radio-mitrailleur et un mécanicien de bord.


La centaine de chars produite en 1939 est envoyée contre les Finlandais durant la fameuse Guerre d’hiver, et là les faiblesses du KV1 apparaissent vite :

-Si la suspension est excellente, l’ergonomie des postes de combat est nulle, imposant une fatigue injustifiée à l’équipage.
Le pilote est d’ailleurs le plus mal loti car les commandes sont d’une dureté excessive ! Au point que très souvent, épuisé, le mécanicien embarqué le remplace alors aux commandes…
-Le moteur est sous-dimensionné pour le KV1 et fait montre de nombreuses déficiences (il chauffe en particulier).
Mais le pire concerne le couple embrayage-boite de vitesses : Aucun KV1 n’a jamais pu dépasser les 130km parcourus sans casse à ce niveau…
-La radio embarquée est également d’une fiabilité désastreuse.


La chambre de combat.




Capturé par les Finlandais...



On remplace en 1940 le canon L11 d’origine par une pièce de même calibre mais plus performante : le L32 (approvisionné à 111 coups).
300 exemplaires de cette version sortiront des usines de Chelyabinsk et de Leningrad.

Pour l’année 1941, les autorités décident de surblinder le KV1 avec des plaques additionnelles de 20mm sur le glacis et les flancs.
On rajoute aussi des plaques boulonnées sur la tourelle d'une épaisseur de 50mm !
Le poids du KV1 (déjà excessif pour la mécanique) passe de 43,5 à 47 tonnes !
En plus de ne pas dépasser 25km/h sur bonne route, aucun KV1E (pour Ekranami : Surblindé) ne fera plus de 100km sans pannes mécaniques graves !
A sa décharge, ce modèle est absolument invulnérable à tout ce que les Allemands pourront lui opposer au début de Barbarossa, même le 88mm Flak ne peut le percer sous certains angles.


Un KV1E. Notez les plaques de blindages additionnelles boulonnées sur la tourelle. 



Des KV1E rentreront dans leurs lignes avec parfois plus de 100 impacts sur leur blindage !

Une autre version non surblindée sortira la même année, avec une tourelle très modifiée, améliorant l’angle de tir de la mitrailleuse arrière et la vision globale du champ de bataille par le biais de périscopes plus performants.
Certaines d’entre elles seront en métal coulé, garantie d’une meilleure résistance aux coups ennemis.
Leur épaisseur passe à 110mm en frontal et 95mm en latéral.


En mauvaise posture... En cas d'enlisement, le pilote n'avait que peu de moyens pour s'en sortir, la mécanique ne résistant pas à des manoeuvres répétées.



En 1942 une nouvelle tourelle en acier coulé voit le jour, nantie d’un blindage tous azimuth de 120mm !
Celui du chassis passe de 75 à 90mm, le glacis dépasse les 110mm.
Le poids rejoint alors celui du KV1E avec 47 tonnes. 

Trop sollicitée, la mécanique pose des problèmes insolubles…

Les ingénieurs décident alors de prendre le problème à l’envers et limitent l’épaisseur du blindage pour gagner du poids.
La version KV1S (pour Skorostny : Rapide) repasse sous la barre des 44 tonnes, mais le blindage du chassis rejoint ses origines avec 75mm.
Le moteur gagne une cinquantaine de chevaux.
Il peut (théoriquement) dépasser 45km/h.
La toute nouvelle tourelle surbaissée et profilée n’est plus épaisse que de 82mm mais protège mieux ses servants en favorisant les ricochets des projectiles ennemis.
La transmission, revue, est enfin fiable !


Quelqu'un pour traduire ? 



Un KV85 équipé d’un canon de 85mm verra le jour vers le début de 1943, mais l’apparition du T34/85 équipé du même tube (mais infiniment plus rapide et plus maniable que lui) en limitera la production à 130 engins.

La sortie des chars lourds type JS (pour Josef Staline) relégueront les KV1 au magasin des souvenirs très rapidement.

On pense qu’environ 4300 KV1 de tous types furent produits.




Il s’agissait d’un excellent concept de char lourd, que d’ailleurs les Allemands ne possédaient pas encore en 1941, hélas une fiabilité mécanique proprement catastrophique et une très mauvaise distribution des rôles de l’équipage dans la chambre de combat (le chef de char faisait aussi office de chargeur !  ) l’empêcha de devenir un char de légende.

Il en était pourtant vraiment à 2 doigts…


En action : http://www.youtube.com/watch?v=0ygmu3IfnZg

 Merci Jensen.